"La musique est plus essentielle pour les vivants que les cercueils ne le sont pour les morts"

Théodore Steinway

Interlude est un one-shot librement inspiré d'une histoire vraie qui a eu lieu durant la seconde guerre mondiale . En 1943, des pianos connus sous le nom de "Victory Verticals" sont parachutés aux troupes en attentes et destinées à leur remonter le moral. En tout, 2436 pianos ont été envoyé sur le front.

Décembre 1944, La Roche en Ardenne, au cœur d'une unité de soldat américains qui se préparent à partir suite à une offensive allemande. Quelques jours avant cela, un piano a été parachuté proche du camps. Les soldats apprécient cet interlude musical qui leur donne un peu de baume au cœur.

Lorsque le départ a sonné, trois soldats refusent de laisser derrière eux l'instrument. Il décident de le transporter à bout de bras, avec seulement une corde. Un périple qui s'avère difficile, dans le froid et la neige, avec le risque de tomber sur l'ennemi...

Interlude est une belle histoire et une découverte intéressante et inattendu d'un aspect de la guerre méconnu. Le rythme de cet album est soutenu. La guerre est présente en fond et la musique permet d'oublier quelques instants la violence de celle-ci et de retrouver des contact humains chaleureux et de faire remonter quelques souvenirs heureux d'avant guerre.

Une BD touchante.

Il arrive que la narration d’un livre soit confiée à un objet plutôt qu’à un sujet. C’est le cas de La Bombe où l’uranium scande les étapes d’élaboration de l’arme fatale, ou d’Histoire de Jérusalem dont un olivier millénaire témoigne des étapes historiques. Les autrices d’Interlude auraient pu avoir recours à ce procédé tant un piano occupe le rôle principal : un piano droit, peu encombrant, réduit à sa fonction la plus simple ; un Stenway vert olive parachuté par l’état-major des troupes américaines stationnées dans l’hiver des Ardennes de 1944 – 1945. Destiné à égayer la vie des militaires, ce piano va devenir l’enjeu principal des préoccupations d’un groupe de soldats mélomanes qui obtiendront de leur hiérarchie qu’elle tolère son déplacement au cours d’opérations mobiles. D’un fait historique peu réputé, Céline Pieters et Celia Ducaju tirent un récit dense et sensible, très bien documenté. La qualité des dialogues produit d’emblée un attachement aux personnages, que vient renforcer le choix des attitudes et l’inspiration de la mise en couleurs jonglant entre les scènes extérieures glacées et les intermèdes musicaux flamboyants. Interlude est la première bande dessinée de deux autrices racontant avec brio une histoire d’hommes aussi convaincante que si elles avaient été cachées derrière chaque arbre de la forêt ardennaise. C’est suffisamment rare pour être souligné. Et le livre coule si bien qu’il nous autorise à en espérer d’autres de leur part.