Fuir. 
Quitter l'Europe, dans ce futur proche et dystopique, des millions de réfugiés s'accumulent au port du Havre. Leurs saluts ; ils l'espèrent tous ; sera de prendre un ferry direction l'Islande. Pays qui semble, pour l'heure, relativement peu impacté par la chute du monde moderne. Dans ce chaos de fin du monde, un homme échappe aux autorités. Liam est beau, athlétique, un animal furieux que rien n'arrête. Lors d'une bousculade, il en profite pour arracher des mains d'une expatriée son laisser-passer. Dans le bateau le conduisant en Islande, il regarde cette femme laissée à quai. Dans leurs regards, on y lit l'effroi d'un monde dit "civilisé" qui s'éteint. Le pays tant attendu sera-t-il à la hauteur des renoncements ?

Caryl Feret, romancier à succès, récidive avec Corentin Rouge au dessin en accouchant d'une bande dessinée proche d'un film blockbuster. Contrairement à leur œuvre précédente le one-shot "Sangoma", les auteurs prennent le pari risqué de livrer le début d'une série qui se fera en trois temps. Il n'y a pas que le climat de l'Islande qui est froid, le cœur des protagonistes, leurs regards le sont tout autant. L'humaniste qui est en chacun de nous sera outré par les trajectoires des âmes qui y vivent, mais Feret ne se dérobe pas en y croquant une société qui s'enlise dans ses failles. Ce n'est certes pas agréable à lire mais c'est particulièrement bien fait. Corentin Rouge, le dessinateur, d'un trait mainstream rappel la belle époque des grands dessinateurs. Bref, Islander, c'est LA série de ce début d'année.

Alors que la Bande-Dessinée traditionnelle au dessin réaliste semble désuète, ou du moins, tombée en disgrâce pour tout un lectorat, il arrive que l’on soit cueilli par les qualités graphique d’un dessinateur. C’est le cas avec la nouvelle série (en 3 tomes seulement) de Corentin Rouge scénarisée par Caryl Ferrey aux éditions Glénat : Islanders. Evidemment, on connaissait le talent du jeune homme depuis ses débuts avec Milan K, Rio, Juarez et ces derniers ouvrages tels que Sangoma mais pour celles et ceux qui ne le connaissent pas s’il fallait placer Corentin sur la carte des dessinateurs de Bande-Dessinée, il faudrait le placer entre Jean Giraud et François Boucq, légèrement décentrer par l’influence de son papa Michel Rouge (dessinateur notamment de Comanche, mais aussi d’une manière plus lointaine des Héros Cavaliers dans feu la collection Vécu de Glénat). Autant vous dire qu’il y a un bagage graphique de qualité mis au service d’un dynamisme contemporain et d’une mise en couleur relevant cet engagement.
Et quelle couv’ !

La partie de Caryl Ferey, n’est pas en reste, romancier à succès il était peu dire que son récit était attendu. Dérèglement climatique, immigration, politique, tout s’inscrit avec fluidité dans ce récit engagé qui, si vous avez l’intelligence de lire entre les lignes (et je n’en doute pas) sera un éclairage éblouissant sur ce que nous vivons actuellement mais du point de vue d'autrui. Et c’est cela la force d’un grand récit; nous faire vivre une vie romancée qui n’est pas la nôtre nous permettant de développer notre empathie, notre compréhension du monde et de l’autre, de frissonner, de se tendre, d’espérer, etc...

De fait, un grand récit sur tous les points qui font la richesse du 9e Art.

Les auteurs de Sangoma nous embarquent cette fois dans un polar glacial, aussi bien pour sa localisation (l'Islande donc), que par le futur proche qu'il imagine pour des protagonistes durs. La trilogie promet d'être passionnante !

Dans un futur proche, les crises à répétitions engendrent une immigration massive vers les iles du nord de l'Europe. Le professeur Zizek tente de rallier l'Islande avec deux jeunes femmes et un homme de main. Non loin, Liam, un jeune sans papier tente coûte que coûte de prendre le même bateau. Vont s'en suivre de nombreuses péripéties qui vont menez nos protagonistes de Charybde en Scylla.

Après l'excellent "Sangoma", Corentin Rouge et le romancier Caryl Ferey se réunissent à nouveau pour un récit d'anticipation extrêmement réaliste qui nous plonge au cœur d'une crise politique, sociale et écologique majeure. En alternant les points de vus et les situations, ils nous offrent un regard désabusé sur la nature humaine où seuls quelques êtres d'exceptions semble encore se préoccuper de leur prochain.

Un récit fort et prenant !