Nous on aime les westerns atypiques. Ceux qui, en plus d’aller à rebrousse-poil de l’histoire officielle, nous entraînent à travers leur élan graphique vers des rivages inexplorés. C’est le cas du livre de Glen Chapron dont l’une des nombreuses qualités n’est rien de moins que de nous replonger, grâce à la transcription habitée de la rudesse des relations humaines, d’un environnement parfois hostile et d’une vision féministe de l’aventure, dans l’émotion que la trilogie Martha Jane Cannary avait autrefois suscitée.

Comme un bagnard prend la poudre d’escampette dans le fracas et les hurlements de chiens, une femme tente d’échapper à la vindicte auquel son destin semble soumis. La course-poursuite qui s’entame durera tout le livre et l’acharnement des poursuivants ressemblera pour la veuve, gibier des opiniâtres chasseurs, à une épée de Damoclès assombrissant les instants de bonheur fugace de l’ombre d’une menace.

Le danger pointe en permanence dans les pages de Glen Chapron. Le trait charbonneux du crayon à peine rehaussé d’encre souligne l’hostilité des forêts, la vastitude d’un territoire auquel pourtant nul n’échappe, l’urgence qui habite la jeune femme acculée de toutes parts. L’amour a-t-il sa place dans cet enfer ? C’est la question à laquelle l’auteur tentera de répondre par l’entremise de ses personnages et la pirouette d’une fin formidable.

Une femme seule, dans la forêt, deux hommes sont à ses trousses. Elle tente de leur échapper et surtout de fuir son passé, trop lourd, trop douloureux.

Son parcours sera alors jalonné de mains tendues, mais elle a été trahie, abusée, déçue, et la confiance se gagne difficilement. Certains cependant parviendront à l'apprivoiser, à lui offrir du bon, de quoi reprendre espoir et panser ses maux pendant ce répit qui reste précaire, ses poursuivants sont bien déterminés à se venger.

"La veuve", avec ses espaces du mythique Far West, avec sa galerie de personnages typés et typiques, a des allures de western mais le récit va bien au-delà. Âpre et haletant, il retrace le parcours d'une femme en quête de liberté, tour à tour fragile, touchante, farouche, et surtout profondément humaine.

Glen Chapron prête son trait charbonneux aux décors immenses et sauvages de l'ouest américain, certaines pages sans texte et contemplatives jouent de façon écrasante avec les ombres et les silhouettes, que seul le travail du noir et blanc peut permettre, les visages en quelques lignes traduisent toute l'intensité des émotions et des sentiments qui animent les protagonistes. Le cadre est posé, l'ambiance aussi.

Les marqueurs du western mais un scénario et un graphisme qui s'affranchissent des codes classiques pour nous entraîner dans un récit tout en puissance et en finesse.

1903 Canada. Mary Bolton fuit à travers les Rocheuses. Que fuit-elle dans cette nature hostile ? Les hommes ? La justice ? Sa condition de veuve ?
A travers ce destin de femme libre, Glen Chapron nous livre un magnifique western féminin au trait charbonneux. C'est captivant, sauvage et lumineux !

Glen Chapron nous régale avec cette adaptation du roman de Gil Adamson. Ce tout noir et blanc est magnifique et permet d'apprécier pleinement les paysages décrits par l'auteur.

Partez confiants avec une histoire complète, sur fond de traque ; c'est haletant.