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Coup de Coeur

Bertrand, libraire chez TRIBULLES

Ça nous est toujours facile de nous nimber de notre manteau de cynisme 100% français, d’autant plus que le crachin semblant s’insinuer à l’horizontale dans la tronche dans un décor de nuit perpétuelle dès 17h30 sonnées. Malgré les monceaux de tablettes de vitamines courant tout l’alphabet, la sinistrose est de mise, et seule la perspective de la Grand Messe du rondouillard enrougit sert de phare à cette période délétère.
Bon, on s’est échauffé la plume à défaut des jambes et il faut bien admettre sous nos cuirasses de gens de lettres, dilettantes résilients aux affres de l’existence, sous ces cuirasses donc patinées par le choc brutal contre le monolithe de la bêtise humaine, se cachent des petits roudoudous sensibles, aux yeux illuminés de trop regarder le soleil et de savoir pleurer de joie.
C’est donc avec une légère appréhension de laisser s’épanouir ce petit chiot inoffensif intérieur que nous ouvriions cet illustré, car il se pourrait même que nous versions une larmichette, ou deux. Peut-être subirons nous cette abjecte injonction à observer les petits bonheurs autour de nous, là où le fiel et la bassesse sont parfois autrement plus humains et donc touchants.
Retranché derrière notre analyse professionnelle, nous avons accepté de glisser l’orteil dans le pédiluve de ce que représente l’analyse d’une couverture. Les tons roses n’ont guère pesé dans la balance face aux noms de Vincent Henry que l’on tient en haute estime pour ses travaux graphiques notamment en partenariat avec son oncle comme responsable du scénario, et sa collègue Valéria Guffanti aux postes chromo-grapho-relatés.
En un savant montage alterné entre diverses protagonistes, on se laisse volontiers couler dans ce récit comme dans un bon bain, auquel on a rajouté un peu de bain moussant fantaisie. N’existe qu’un moment agréable entre le lecteur, le livre. La lecture se fait sans aucune intellectualisation, les tribulations de cette famille qui se construit savent nous saisir avec douceur et dans un second temps, très bien calibré, des inquiétudes qui peuvent naître de cette douceur apparente. De savoir s’il on va être en mesure de rentrer dans notre rôle de parent, de savoir s’il est besoin que l’on s’en créer un, de savoir composer avec cette trajectoire forcément imparfaite qu’on appelle la vie impacter notre enfant.
Pour quiconque n’a pas de parcours fécondatoire rectiligne, cet album est une vraie belle séance de montagnes russes, qui savent raviver l’intensité des émotions des premiers jours et mois de vie d’un enfant. Et tout cela est réalisé grâce à une immense humilité, doublée d’une grande simplicité ce qui donne beaucoup de puissance au syndrome d’identification. Et c’est une vraie bouffée d’air frais, de tomber sur un titre qui célèbre ce qui nous rassemble, qui propose l’aspect humain d’une expérience en premier plan et se concentre sur le caractère universel de celle-ci ; Ne pensez-vous pas ?

Publié le 5 fév. 2025